Les origines
En fait la distribution électronique en hôtellerie trouve sa source au début des années 70 : les compagnies aériennes viennent alors de mettre en place des réseaux de distribution de billets d’avions au niveau mondial (c’est encore le début des ordinateurs en entreprise) et il a vite semblé naturel de proposer des chambres d’hôtels grâce aux mêmes réseaux. Ainsi, par exemple, un agent de voyages de Bordeaux pouvait-il vendre à ses clients des billets d’avion et des chambres d’hôtels du monde entier en consultant immédiatement les prix, les disponibilités et prendre les réservations sans passer par le télex (sorte de machine à écrire de à distance de l’époque ou par le téléphone…assez peu pratique).
L’antique Telex, révolutionnaire à l’époque, il permettait de transmettre un message écrit à distance . Ex: « ask for booking on march 15th, one Deluxe room, single, breakfast. Please confirm availability and price ». Lorsque les systèmes de réservations par ordinateur des compagnies aériennes sont apparus le Telex a semblé dépassé.
Au bout de quelques années les autorités de différents pays ont exigés que les compagnies se détachent de ces réseaux car ils étaient limitatifs en matière de concurrence: ainsi les systèmes de réservation sont devenus indépendants et ont pris le nom de GDS (Global Distribution System) désignant donc des logiciels de réservations de prestations touristiques (avion, hôtel, location de voiture, train…).
Ces GDS sont aujourd’hui encore très actifs dans les transactions entre agences de voyages d’une part et compagnies aériennes et centrales de réservations hôtelières (CRS) d’autres part.
Acteurs BtoB, peu connus du grand public les principaux GDS sont Amadeus, Sabre, Galileo, Worldspan, crées il y a 50 ans ils représentent toujours une part importante de la distribution de chambre d’hôtels.
Afin de rendre compatibles les échanges de données hôtelières, un système de connexion (switch) entre GDS d’une part et centrales de réservation/logiciels hôteliers d’autre part, a été mis sur le marché. Il n’y a pratiquement aujourd’hui qu’une switch company: DHISCO (PEGASUS), laquelle voit passer des MILLIARDS de transactions hôtelières chaque année.
La montée en puissance d’internet dans la distribution hôtelière
Compte tenu de son importance, de sa généralisation, le Web est devenu un outil incontournable de distribution hôtelière:
– les acteurs historiques (GDS) sont largement présents sur le web: ils ont créé ou racheté des opérateurs spécialisés sur Internet (Lastminute, Orbitz… parfois revendus ensuite)
– les Groupes hôteliers, puis les hôtels indépendants ont créé des sites internet afin de vendre leurs chambres dans le monde entier sans intermédiaires.
– enfin l’e-distribution hôtelière a vu apparaître des distributeurs électroniques (« pure players »: c’est à dire présents uniquement sur le web) plus ou moins spécialisés, tel Booking.com, Hotels.com, Expedia
On considère aujourd’hui que la majorité des ventes de chambres se font par le Web: soit directement par les hôteliers soit par des intermédiaires (on parle d’ADS pour Alternative Distribution System) au premier rang desquels on trouve des OTA’s (Online Travel Agencies) mais également les VDM (spécialistes des Ventes de Dernières Minutes: degriftour ou ratestogo par exemple), les fastsellers (type Ventes Privées ou Groupon)
La distribution directe
(lire en complément Bâtir une politique attractive pour les ventes directe)
Un hôtel, un Groupe hôtelier, cherche généralement à vendre les chambres directement sur son site web, il évite ainsi de payer des commissions aux intermédiaires.
Toutefois les difficultés sont nombreuses:
1- Il faut concevoir un site internet qui permet à l’internaute de voir les disponibilités et les prix « en direct » et de pouvoir réserver. Cela suppose que le site soit connecté avec le PMS (property management system pour désigner le logiciel de gestion de l’hôtel) de l’hôtel. Pour cela il faut que le site web et le PMS soit connectés et compatibles: cela pose des problèmes techniques (le web master doit avoir les codes sources du PMS…ce qui est pratiquement impossible) et des problèmes de sécurité. La solution pour l’hôtelier consiste à acquérir un moteur de réservation (booking engine) spécialisé qu’il mettra sur son site web (en fait l’internaute sera généralement redirigé, discrètement, vers ce moteur de réservation). Le moteur de réservation, payant pour l’hôtelier, assure la connexion entre le site web et le PMS et la sécurité. L’hôtelier dispose d’une interface de gestion lui permettant de définir le nombre de chambres et les tarifs disponibles sur le site (en fait le moteur de réservation servira également à l’hôtelier lorsqu’il mettra en vente des chambres sur les OTA’s).
2- Il faut un bon référencement au site (un bon classement dans les moteurs de recherches, cela s’obtient en faisant un bon travail de SEO, search engine optimization), un bon design, une offre tarifaire attractive… autant de choses pas toujours faciles à faire.
3- Il faut que l’offre sur le site Internet soit attractive en matière de prix (moins cher que sur les OTA’s, en tout cas pas plus cher), de disponibilités (il faut fermer les ventes sur les OTA’s avant de les fermer sur le site de l’hôtel…et non l’inverse), en matière de produits (certains produits peuvent n’être vendus que sur le site de l’hôtelier, pas sur ceux des distributeurs)
Remarque: les PMS les plus performants ont un moteur de réservation intégré.
Exemple de PMS avec booking engine: Roomer
Deuxième exemple, le classique Fidelio:
La vente par les intermédiaires (OTA’s principalement)
Comme précédemment des questions techniques se posent : comment synchroniser le PMS et l’offre que l’hôtelier met en vente sur les différents OTA’s ? Il dispose pour cela d’une interface de gestion, mis à disposition par l’OTA’s qui lui permet de gérer son offre (nombre de chambres, tarif,…). Mais il est fastidieux d’utiliser quotidiennement les interfaces de chaque OTA’s. Pour éviter cela un PMS qui dispose d’un booking engine peut être très utile. L’hôtelier affectera pour chaque jour ouvert à la vente une partie (ou la totalité) de ses chambres à chaque OTA. Cette affectation se fera en fonction des prévisions de ventes, des taux de commission et des rapports avec l’OTA (par exemple l’hôtelier peut avoir signé une clause parité d’inventaire, selon laquelle il s’engage à mettre en vente des chambres sur le site de l’OTA tant que hôtel n’est pas complet) . Cette affectation des chambres par canal, par OTA, c’est le chanel management….. qui n’est pas sans liens avec le revenue management (lire plus sur le RM: ici). En effet, sauf cas particulier, il faut éviter de continuer à vendre sur un OTA si le prix net de commission est inférieur à celui d’une classe fermée.
Pour la plupart des hôtels les OTA’s sont devenues incontournables. En effet malgré les commissions (souvent de l’ordre de 20% du prix de la chambre) les hôteliers peuvent trouver là un double avantage:
– les OTA’s, toujours très bien référencées dans les moteurs de recherches et disposant d’un bon e-merchandising, peuvent écouler beaucoup de chambres pour l’hôtelier.
– l’hôtelier peut bénéficier d’un effet billboard: la présence sur les sites des grosses OTA’s augmentent les ventes de l’hôtel EN DIRECT. En effet de nombreux internautes apprennent l’existence de l’hôtel sur Expedia, Booking…puis cherchent le site « officiel » de l’hôtel pour prendre leur réservation. (Par exemple, une étude de l’Université de Cornell évalue l’effet billboard à 7,5% lorsque l’hôtelier est présent sur Expedia).
Toutefois l’hôtelier peut aussi y trouver des inconvénients:
– les commissions sont élevées (environ 15/20% du prix de la chambre, parfois plus)
– les clients sont ceux du distributeurs et non ceux de l’hôtelier; l’hôtelier ne dispose pas des cordonnées du client. Le maintien de la relation (CRM), la fidélisation seront difficiles.
– les relations avec les OTA’s sont déséquilibrées et les hôteliers se trouvent en position de faiblesse. Les OTA’s peuvent imposer (plus ou moins règlementairement) des conditions désavantageuses pour l’hôtelier; parité tarifaire (l’hôtelier ne peut pas vendre moins chez que sur le site de l’OTA), parité d’inventaire (l’hôtelier doit continuer à alimenter l’OTA en chambre tant qu’il lui reste des disponibilités), parité de promotion (l’hôtelier doit faire les mêmes promotions sur le site de l’OTA que sur son propre site). L’hôtelier peut parfois devoir financer son référencement au sein des pages de l’OTA…
– l’ensemble peu devenir complexe à gérer, en particulier pour des petits établissements qui n’ont pas de personnel dédié au channel management.
Pour conclure: les tendances de la distribution électronique en hôtellerie
- La résistance des hôteliers face aux OTA’s: lire bâtir une politique attractive pour les ventes directes
- Big Data: valorisation des statistiques à propos des consommateurs
- Analytics: analyses du trafic sur les sites et réseaux sociaux pour optimiser l’offre, la relation…
- Personnalisation: plus efficace mais aussi préférée par les internautes
- Réservation par mobile: toujours plus…
- Multi écran: smartphone, ordinateur, tablette, montre…liés entre eux, évidemment!
A voir:
Le point de vente et sa localisation (y compris, zone de chalandise, merchandising, expérience client / parcours client)
La distribution électronique en hôtellerie